Alarmant : le prix du lait ne couvre que 65% des coûts de production !
L’European Milk Board (EMB) vient de sortir un communiqué avec des chiffres plutôt alarmants sur le marché du lait en Allemagne. Tout comme leurs collègues européens, les producteurs allemands subissent de lourdes pertes. Beaucoup n’ont plus d’autres choix que de limiter les quantités de lait.
Les chiffres actuels relatifs aux coûts de la production laitière en Allemagne, publiés récemment par le bureau allemand BAL (Büro für Agrarsoziologie), ne laissent planer aucun doute quant à la gravité de la crise que traverse le marché du lait. En octobre 2015, les coûts de production s’élevaient, en moyenne, à 44,37 centimes par kilo de lait. Le prix versé au producteur en Allemagne, pendant la même période, ne se montait toutefois qu’à 29,01 centimes.
Le rapport prix-coût révèle une importante sous-couverture des coûts
Le rapport prix-coût, qui indique dans quelle mesure les coûts de production sont couverts par le prix du lait, affiche une valeur de 0,65 pour le mois d’octobre. Les coûts ne sont donc couverts qu’à concurrence de 65 pour cent par le prix payé au producteur. Les exploitations ont dès lors de plus en plus de difficultés à effectuer des réparations ou à procéder aux investissements de remplacement nécessaires. Les salaires eux-mêmes sont insuffisants.
Une crise européenne
Il n’y a pas qu’en Allemagne que les prix ne couvrent pas les coûts. Dans les autres pays européens, les prix sont aussi inférieurs au seuil de 30 centimes. Au Danemark et aux Pays-Bas par exemple, le prix ne s’élève qu’à 29 centimes ; en Belgique, il avoisine déjà les 25 centimes depuis des mois. En Lituanie, le prix n’était, fin 2015, que de 20 centimes, ou même de 10 centimes seulement par kilo de lait pour certains producteurs.
Etant donné que la tendance à livrer sur le marché des quantités de lait supérieures à la demande se poursuit depuis octobre, les prix du lait ne se redresseront pas à moyen terme ni même très probablement à long terme. Romuald Schaber, président de l’EMB, ne voit aucune perspective d’amélioration étant donné la politique laitière menée à l’heure actuelle par l’UE : « La situation de déficit va se maintenir et ne faire qu’accroître les dettes ainsi que le nombre d’exploitations cessant leur activité, sans permettre aux exploitants de procéder aux investissements nécessaires. »
Traire moins de lait pour un prix stable
Limiter les quantités de lait, tel est dès lors l’objectif de nombreux producteurs de lait en Europe. Mais étant donné que lorsque les prix sont critiques, le producteur se voit plutôt contraint à augmenter sa production pour réduire les coûts unitaires, il faut un cadre commun qui s’applique à tous les producteurs au niveau européen. La pierre angulaire d’une réglementation-cadre de ce type pourrait consister en une réduction volontaire des volumes liée à des incitants positifs. Les éleveurs laitiers qui seraient intéressés par une telle réduction de la production, se verraient octroyer un bonus ; la pression due aux quantités exercée sur le marché, serait ainsi réduite. FrieslandCampina, une des plus grandes laiteries européennes applique déjà, à l’heure actuelle, un système de prime visant à réduire les quantités de lait. En effet, l’absence d’instrument de marché cause des difficultés non seulement aux producteurs, mais également à l’industrie du lait.
Le Programme de responsabilisation face au marché (PRM) est déjà, à cet égard, un bon cadre pour le secteur laitier, y compris la réduction volontaire des volumes. L’EMB attend de la politique européenne qu’elle applique ce cadre et enclenche enfin le processus de stabilisation du marché du lait.
En savoir plus ?
Voir le dossier « Vouloir le lait et l’argent du lait » dans le dernier numéro de Défis Sud.