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Rencontre avec Korotoumou Gariko, productrice de lait au Burkina Faso

Lait • 11 avril 2019

Lors de la première semaine d’avril, SOS Faim a organisé un nouveau cycle de conférences « Rencontre avec le Sud » pour permettre à des étudiants de Hautes Écoles et autres universités de se confronter aux enjeux agricoles et aux relations Nord-Sud. S’inscrivant dans la campagne « N’exportons pas nos problèmes », ce cycle s’est concentré autour de la thématique du lait. Korotoumou Gariko, productrice burkinabè, membre de l’Union Nationale des Mini-Laiteries du Burkina et de la Confédération Paysanne du Faso et partenaire de la campagne « Mon lait est local » a été invitée pour l’occasion pour enrichir ces rencontres, en témoignant de sa réalité. Rencontre avec cette productrice engagée.

L’importance de promouvoir le lait local

Au Burkina Faso, 80% de la population active travaille dans le milieu agricole. Dès lors, promouvoir le lait local face à la concurrence du lait importé est une priorité. N’ayant pas grandie dans cette filière mais y ayant été confrontée après son mariage, Madame Gariko a choisi d’en faire son combat.
Devant l’objectif, elle tient à lever ses cinq doigts : un pour chaque levier qui pourrait être développé si le gouvernement burkinabè soutenait le lait local. En effet, cet investissement développerait l’élevage et donc la production de lait en elle-même, mais également celle de veaux (pour leur viande), de fumier (pour l’agriculture), de cuir (pour l’artisanat et la maroquinerie) et de sabots et cornes (pour l’artisanat également). Soutenir le lait local revient donc, selon elle, à soutenir un développement au potentiel énorme.

Le lait au féminin

Mais cet engagement, elle le dédie avant tout aux femmes. Se proclamant féministe, elle explique comment celles-ci ont toujours été porteuses de la production laitière au Burkina Faso, se chargeant de la traite et de l’échange de cette denrée contre d’autres biens nécessaires à la famille. Cependant, depuis la fin des années 90 qui a vu le développement des unités de transformations permettant une meilleure rentabilité, les femmes sont mises à l’écart de la filière. Pour leur permettre de s’assurer un revenu et de soutenir leur famille, Korotoumou Gariko a alors créé en 2001 une première mini-laiterie, aujourd’hui suivie par d’autres.
Ces mini-laiteries sont des petites unités de transformation possédant l’essentiel pour transformer et stocker le lait. Celles-ci permettent donc de valoriser ce produit brut et de faire face aux conditions de stockage et de conservation locales difficiles. En permettant d’améliorer leurs rendements et leurs ventes, ces structures ont pour but de rendre les femmes autonomes dans les 2 à 3 ans suivant leur accompagnement.

Un changement de politique, une meilleure solidarité

Cependant, ne l’oublions pas, les enjeux de la filière se jouent aussi au niveau mondial. Comme le souligne Madame Gariko, ce n’est pas raisonnable de mettre le lait européen et le lait africain sur le même marché étant donné que l’échelle de production est tout à fait différente. En effet, alors qu’au Nord une vache laitière produit entre 25 et 35 litres par jour, les vaches locales n’en produisent que 3 ou 4. Métisser les vaches pour augmenter la production quotidienne, développer la transformation pour obtenir une valeur ajoutée… Ces solutions sont déjà considérées et développées mais elles ne suffiront pas à rétablir l’équilibre.
Prix régionaux et non mondiaux, droits de douane pour subventionner et promouvoir l’agriculture locale, production ne dépassant pas les besoins de la population… Voilà ce que cite Madame Gariko comme agenda politique pour atteindre la souveraineté alimentaire et obtenir des prix qui soient rémunérateurs. Et pour cela, selon elle : « il faut une meilleure solidarité ».

Coopération et action

Il faudra donc changer de stratégies, changer de politique. Korotoumou Gariko n’a pas manqué d’interpeller les étudiants en les encourageant à soutenir cela et à sensibiliser à leur tour. À la fin de son témoignage, c’était un message de coopération et d’action qu’elle tenait à faire passer : en tant que consommateur, qu’électeur et que politicien de demain, il faut soutenir la production locale de son propre pays et aider chaque pays à vivre de sa propre production.

A vos agendas

Retrouvez Korotoumou Gariko au Ciné-Club Alimenterre qui aura lieu le 11 avril à partir de 19h au Cinéma Galeries de Bruxelles. Au programme, projection de « La planète Lait » d’Andreas Pichler, lauréat du Prix Alimenterre 2018 et échange avec madame Gariko et Guy Francq, producteur belge, président de la MIG et membre de l’EMB.

Pour en savoir plus

Découvrez la page dédiée à notre campagne « N’exportons pas nos problèmes » qui dénonce la surproduction de lait en Europe et ses conséquences pour les éleveurs européens et ouest-africains.

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